Mohamed Hamdaoui
27 sept. 2021
Portrait: Pascal Choulat, protégé des rois
Ce Biennois de 61 ans exerce avec passion la profession de plus en plus rare de tapissier.
«J’aime dessiner, je sais me servir de mes mains et aime bricoler. Devenir tapissier était donc presque une évidence!» Voilà donc plus de 40 ans que ce Biennois vit de sa passion: recouvrir des sièges, tendre des étoffes et redonner vie à des fauteuils anciens.
Apprentissage.
C’est à Bienne, ville où il est né en 1960, que Pascal Choulat avait effectué son apprentissage. «Mon maître d’apprentissage était assez strict. Mais au bout de quelques semaines, j’étais sûr d’avoir trouvé ma voie», explique celui qui a très vite appris à manier les marteaux, les clous, les sangles et les ressorts. Il se met ensuite à son compte, mais son commerce est victime d’un incendie. Cet originaire de Porrentruy part alors s’installer à Villeret. «Les plus belles années de ma vie professionnelle.»
Durant 17 ans, il y pratique le métier de tapissier, formant aussi des apprentis. Jadis, les tapissiers étaient les protégés des rois et des reines dans les plus grandes cours. Dans le Jura bernois, Pascal Choulat peut compter sur une clientèle fidèle, dont quelques personnes fortunées. «C’était des clients qui avaient des connaissances très pointues du métier et formulaient des demandes très précises.» Pas question de les décevoir au moment de rembourrer un vieux meuble ou de redonner vie à un fauteuil de style Empire.
Émotions.
«Mais j’avais aussi des clients plus modestes qui disposaient de budgets limités. Beaucoup venaient pour que j’essaie de redonner vie à des meubles qui leur tenaient à cœur, par exemple les vieilles chaises de leurs grands-parents. C’est émouvant de découvrir leur réaction quand ils voient le résultat final.»
La belle aventure s’arrête au moment de son divorce. Ce coup du sort contraint Pascal Choulat à repartir à zéro. Après avoir exercé à Zoug, Lausanne et Sainte-Croix, il ouvre un nouveau commerce à Porrentruy, ville où son grand-père fut aussi tapissier. La chance va lui sourire…
Intriguée par le métier de tapissier, une journaliste décide un jour d’aller faire un reportage dans son atelier. Quelques semaines plus tard, ils se retrouvent dans un cadre plus intimiste, apprennent à se connaître et décident d’unir leurs destins. Au point que Pascal Migy (son nom de naissance), un des fils du créateur de la Brigade des stupéfiants à Bienne Gervais Migy, décide d’adopter le nom de famille de son épouse, Élise Choulat!
Mâche.
Le couple vit désormais à Bienne avec leur enfant, Louis, 3 ans et demi, qui sait déjà bien manier les feutres et les crayons. C’est à Mâche, à la rue du Moulin, que Pascal Choulat a ouvert son nouveau commerce et son atelier. Comme cette famille ne roule pas sur l’or, ils ont emménagé provisoirement dans les sous-sols de cette surface commerciale. Mais en juillet, un incendie les contraint à être hébergés provisoirement par les Services sociaux. «Ce fut pénible. D’autant plus qu’après quelques jours, la Ville nous a dit que nous avions à peine deux heures pour quitter les lieux et être remplacés par d’autres personnes. Je l’ai très mal pris et ai haussé le ton.» Tous trois sont donc repartis vivre au sous-sol de leur commerce. «Mais j’espère que nous trouverons enfin un vrai logement digne de ce nom à un loyer abordable.»
Cet épicurien qui a longtemps bourlingué au Maroc et en Afrique de l’Ouest compte exercer sa passion jusqu’à sa retraite. Il y a quelques années, faute de relève, la profession de tapissier avait failli disparaître de la liste des métiers reconnus par la Confédération. «Mais la relève est là. Et je ne peux que conseiller aux jeunes en quête de créativité de suivre ma voie.»
PHOTO: Joel Schweizer
Légende: Pascal Choulat sait à merveille recouvrir des sièges, tendre des étoffes et redonner vie à des fauteuils anciens. Il aimerait transmettre sa passion de tapissier.